lundi 15 mai 2017

Trois saisons d'orage de Cécile Coulon



Date de parution : janvier 2017 chez Viviane Hamy
Nombre de pages : 262

Le roman s'ouvre sur les propos d'un homme d'église dans un village, il annonce qu'il va nous raconter une histoire qui supplante toutes celles qui ont pu lui être confiées. L'histoire d'une famille de médecins, d'une famille de paysans et d'une maison "Seul un homme qui n'a pas d'histoire peut raconter la leur". Avec ce premier chapitre Cécile Coulon annonce avec habilité dès les premières pages une tragédie qui va se dessiner au fil des pages.
Cécile Coulon plante d'emblée un décor impressionnant en situant son histoire aux Fontaines, un hameau désert avant que les frères Charrier n'ouvrent des carrières aux Trois-Gueules à la fin de la seconde guerre mondiale. Les trois-Gueules, un étau de terre et de pierre où des "fourmis blanches" creusent la falaise, descendent dans les gueules de pierre sous un soleil harassant. Ce monde rude perçu comme hostile par les gens de la ville, qui le surnomment "l'enfer blanc" est vécu  comme un paradis par ses habitants. C'est un lieu où tout le monde se connaît mais c'est aussi un lieu menaçant où la nature n'épargne pas les humains et les animaux victimes de chute des falaises, de noyades dans le torrent ou d'éboulements sous les cris gutturaux des corbeaux qui survolent les lieux. Ces drames qui les frappent sont vécus comme la fatalité par ces gens simples.

André vient s'installer comme médecin aux Trois-Gueules, c'est un homme à la volonté de fer, d'un naturel bienveillant, doux et honnête, il devient protecteur des habitants. Cécile Coulon nous raconte son histoire, celle de son fils Bénédict marié à Agnès, de sa petite-fille Bérangère et l'histoire de la famille de Valère dont Bérangère va tomber amoureuse.

Ce roman parle d'opposition entre deux mondes, celui de la ville opposé à celui de la campagne où les lieux, les cadences de travail façonnent les hommes, où les saisons sont respectées... Mais il parle aussi d'opposition entre deux autres mondes, celui de Bérangère, jeune fille bien née qui vit dans une grande maison majestueuse sur les hauteurs et celui de Valère, son amoureux, un garçon de ferme qui vit en bas du village dans la bouse...

Ce roman m'a offert tout ce que j'aime : un lieu et une atmosphère qui mettent en valeur les ouvriers, les paysans et les médecins de zones reculées, des personnages attachants, superbement décrits aussi bien dans leur physique et dans leur psychologie que dans les relations qu'ils entretiennent entre eux, une grande finesse dans l'analyse des relations père/fils, grand-père/petite fille,  un récit chronologique sur trois générations avec une tension dramatique constante, une tragédie qui s'annonce, une écriture précise, très travaillée et fluide.
Cécile Coulon ne nous noie pas avec une multitude de personnages secondaires, elle nous permet de nous concentrer sur les membres des deux familles concernées, sur leur psychologie, sur le drame qu'on pressent...
Ce roman m'a fait penser à ceux de Ron Rash, comme lui Cécile Coulon a à cœur de faire du lieu où elle situe son histoire un personnage essentiel de son roman et met en scène la lutte entre l'homme et la nature.
Voici un livre éblouissant que j'ai lu d'une traite!

Ce roman est sélectionné sur de nombreuses listes de prix littéraires (prix Orange du livre, Prix des libraires, prix du livre Inter, Prix SGDL...) et je serai très déçue qu'il ne soit pas primé.

Je suis loin d'être la seule à avoir été enthousiasmée par ce roman : voici les avis de Sur la route de Jostein, Noukette, Nicole, la petite Balabolka, Laure et Eva


Citations
"Les ouvriers apprenaient la rudesse de la pierre, les fermiers la rudesse de la terre."

"Elle détenait cette force qu'il ne possédait pas, cette capacité à se mouvoir gracieusement où qu'elle aille, à donner l'illusion de maîtriser les éléments qui l'entouraient, à inspirer les personnes qu'elle rencontrait."

"Parfois, la nuit, quand le sommeil ne venait pas, Agnès était prise d'une nostalgie terrible, la nostalgie des lieux qu'elle n'avait pas connus." 


L'auteure

Cécile Coulon est née en 1990. Après une hypokhâgne et une khâgne à Clermont-Ferrand, elle poursuit ses études en Lettres Modernes. Elle se consacre actuellement à sa thèse dont le sujet est "Sport et Littérature".
Son premier roman Le voleur de vie et son recueil de nouvelles Sauvages ont paru aux Éditions Revoir.
Outre son goût prononcé pour la littérature, elle est aussi passionnée de cinéma et de musique.
Ses cinq romans ont paru aux Éditions Viviane Hamy : Méfiez-vous des enfants sages (2010), Le Roi n’a pas sommeil , Le Rire du grand blessé (2013), Le Cœur du Pélican (2015) et Trois saisons d’orage (2017).

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41ème contribution au Challenge Rentrée Hiver 2017 organisé par Laure de MicMelo
 










8 commentaires:

  1. Ton coup de coeur ne m'étonne pas une seule seconde ! Quelle plume !

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    1. J'avais beaucoup aimé le cœur du pélican mais cette fois c'est carrément plus fort !

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  2. Effectivement, les éloges pleuvent sur ce livre. Ce n'est a priori pas une sujet qui m'enthousiasme particulièrement, mais cette écriture semble être à découvrir...

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    1. Selon moi ce roman est juste parfait pour découvrir cette jeune auteure très très talentueuse

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  3. Je pense que je vais me laisser tenter par celui-là en passant outre mon rdv raté avec Le cœur du pélican.

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    1. J'avais aimé le cœur du pélican mais je trouve celui-ci beaucoup mieux.
      Cela aurait été dommage en effet de rester sur une mauvaise impression car cette auteure est vraiment épatante.
      Je guette ton avis...

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