mardi 17 octobre 2017

La veuve des Van Gogh de Camilo Sanchez


Date de parution : mai 2017 chez Liana Levi
Nombre de pages : 153

Après avoir dévoré deux titres passionnants sur les derniers mois de la vie de Vincent Van Gogh (La valse des arbres et du ciel de Jean-Michel Guenassia et surtout Vincent qu'on assassine de Marianne Jaéglé ) la lecture de ce nouveau roman s'imposait à moi. Camilo Sanchez, un auteur argentin, y relate les mois qui ont suivi la mort de Vincent et la façon dont Johanna Van Gogh a fait connaitre l’œuvre de son beau-frère.

Johanna Van Gogh, la femme de Théo, tenait un journal intime, elle y a fixé les moments importants de sa vie. Ce journal a constitué un précieux matériau pour l'auteur qui entrecoupe son récit d'extraits des écrits de la jeune femme.
La mort de Vincent marque le début de la chute de Théo tellement les deux frères étaient liés. Théo reste replié dans son deuil dans son appartement de Montmartre, entouré des cinq cent tableaux réalisés par son frère. Il veut monter une exposition consacrée à Vincent et réaliser une biographie de Vincent, il relit et classe les lettres que lui a envoyées son frère, passe ses journées au lit, ne va plus travailler à la galerie et culpabilise terriblement de ne pas avoir pu le sauver.   

Johanna, l'épouse de Théo, une jeune femme de 28 ans,  n'a rencontré son beau-frère qu'à une seule occasion deux mois plus tôt, ils ont passé seulement quatre jours ensemble. C'est une femme cultivée qui a suivi des cours de littérature anglaise et qui a accouché d'un petit garçon, prénommé Vincent quelques mois plus tôt. Un prénom à la triste histoire car Vincent Van Gogh avait hérité du prénom de son frère mort un an jour pour jour avant sa naissance "Il a grandi en déposant des fleurs sur une tombe où il lisait son nom et la date de son anniversaire"
La maladie rattrape vite Théo. Atteint de la syphilis, il sombre dans la démence et meurt six mois après son frère ainé en Hollande où Johanna a trouvé refuge auprès de sa famille. Théo ne pouvait pas survivre à son frère tellement la relation qui les unissait était forte, c'était une sorte d'amour inconditionnel, un lien malsain. Van Gogh a fait des crises psychiatriques à chaque nouvelle étape de la vie de Théo, lors de ses fiançailles, lors de l'annonce de la grossesse de Johanna et à la naissance du petit Vincent, il vivait ces étapes comme un abandon accentué par la crainte de perdre la rente mensuelle que lui versait Théo.

Veuve à moins de trente avec un fils de tout juste un an, Johanna va dans un premier temps se plonger dans la correspondance entre les deux frères. En effet Théo possédait 651 lettres de Vincent qu'il n'avait jamais fait lire à son épouse, datées de 1873 à 1890, Van Gogh avait la dernière sur lui le jour de sa mort. Johanna y découvre la condescendance de Vincent envers Théo qui s'est pourtant sacrifié pour lui mais surtout, en élaguant un peu le contenu des lettres des considérations matérielles, elle en fait ressortir une valeur poétique qui l'enthousiasme "Van Gogh écrit comme il peint" et peu à peu s'immerge dans la peinture de son beau-frère et en découvre les clés de compréhension. 
Johanna est une femme déterminée qui doit faire face aux critiques, au désintérêt de sa belle-famille et à l'incompréhension de son père qui ferait bien du bois de chauffage des toiles de Vincent et qui doit résister à des fanatiques qui viennent lui rendre visite pour brûler les tableaux du peintre aussi bien à Paris juste après sa mort qu'en Hollande "des religieux qui voient les signes du démon dans ces toiles", selon eux les toiles porteraient malheur à cause du suicide de Vincent et de la mort de son frère... Rappelons que de son vivant  Van Gogh  n'a vendu que deux tableaux à Bruxelles et n'a eu que deux critiques élogieuses dans la presse.

Johanna a alors une idée fabuleuse pour faire connaitre l’œuvre de Van Gogh : elle ouvre une pension de famille à Bussum près d'Amsterdam, la Villa Helma dont elle orne les murs d'environ 300 toiles de Van Gogh. Parallèlement elle accomplit un immense travail d'édition des lettres qu'elle traduit et a l'idée de joindre certaines lettres aux toiles et aux dessins "pour que l'on comprenne que chez Van Gogh chaque coup de pinceau reposait sur un langage" , la lettre constituant le "corps théorique" du tableau. Elle publiera ces lettres en intégralité en 1914 soit 24 ans après la mort des deux frères.

Ce roman raconte donc dans sa première moitié les quelques mois qui ont séparé la mort des deux frères Van Gogh entre le 29 juillet 1890 et le 25 janvier 1891, date de la mort de Théo puis dans une deuxième moitié comment Johanna a fait sortir de l'ombre l’œuvre de Van Gogh. Ce titre est un complément indispensable aux deux précédents livres que j'ai lus sur ce peintre car je m'interrogeais sur la façon dont Van Gogh était sorti de l'anonymat. 
Dans ce roman j'ai découvert une femme extraordinaire qui a fait preuve d'un immense courage et d'une belle clairvoyance alors qu'aucune personne de la famille de Van Gogh n'avait pris conscience de l'héritage artistique laissé par le peintre. Johanna a su affirmer sa volonté et sa détermination guidée plus par l'intérêt artistique que par un quelconque intérêt financier et s'est montrée fidèle aux instructions que Van Gogh avait laissées à son frère dans ses lettres "exposer tout ce que l'on peut, vendre le nécessaire pour continuer d'exposer et réserver si possible la plus grande part de son œuvre aux musées"
J'ai trouvé ce roman passionnant, sa couverture magnifique et son titre parfaitement adapté. Il n'a qu'un seul défaut à mes yeux : il est trop court... C'est un très bel hommage à une femme qui a changé la face de l'art contemporain.


Les avis de Delphine et de Nicole


Citations
" Théo est la proie d'une seule idée, le suicide de son frère. Tout le reste est hors cadre. Notre fils et moi-même sommes à l'extérieur"

" Je peux maintenant l'écrire sans tristesse : le véritable amour de Théo dans sa vie a été Van Gogh. Ni mon fils ni moi n'avons réusssi à changer son destin."


L'auteur


Camilo Sánchez est né à Mar del Plata (Argentine) en 1958. Diplômé en journalisme et sciences humaines, il a collaboré à différents journaux et revues, dont Ñ et Clarín. Il dirige actuellement Dang Dai, le premier magazine d’échanges culturels entre l’Argentine et la Chine. La Veuve des Van Gogh est son premier roman.(Sources : Éditeur)







Catégorie PERSONNE CELEBRE


2 commentaires:

  1. J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman, moi aussi.

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    1. J'ai lu ta très belle chronique après avoir fini la mienne. C'est un très beau livre en effet.

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